Le charme des "Charmes discrets de la vie conjugale"

Publié le par Cécile Blanchard

Je viens de finir de lire le dernier livre de Douglas Kennedy, « Les charmes discrets de la vie conjugale ». Tout d’abord il faut préciser que j’adore Douglas Kennedy, non pas que ce soit un grand écrivain, du genre qui révolutionne la littérature, mais ses livres se lisent tellement bien, son écriture est tellement fluide, et ses histoires toujours si bien menées qu’on ne peut que se laisser prendre au jeu de la lecture. Là, plus de 600 pages dévorées en trois jours, un bon score. Pourtant « Les charmes discrets de la vie conjugale » n’est certainement pas le meilleur de ses livres, ni le plus passionnant. Et puis quand on les a tous lus, ce qui est mon cas, on connaît la mécanique du Douglas : un personnage sympathique, généralement très droit et honnête qui va soudainement se retrouver dans une situation inextricable dont il va se sortir avec plus ou moins de dommages. Pour autant, je lis toujours ses livres avec plaisir, voire je les dévore. Parce qu’on se demande toujours comment les personnages vont s’en sortir. Et parce que les situations dans lesquelles Douglas les place sont de véritables nœuds de vipère, dont il paraît quasiment impossible de s’échapper, une sorte d’escalade du pire qui semble ne jamais vouloir s’arrêter. C’est là la clé de tout.

Mais dans « Les charmes discrets …», le plus intéressant n’est peut-être pas l’histoire en elle même mais le contexte qu’elle dépeint : l’Amérique des années 70, puis celle des années post 2001, les années Georges Bush. Dans une petite bourgade du Maine. Les déboires d’une femme athée, dont le père est un ancien révolutionnaire anti Vietnam, dans l’Amérique puritaine de nos jours, son patriotisme exacerbé, ses groupes anti avortement, sa morale et ses médias. Car le livre est non seulement une critique des dérives de l’Amérique post 11 septembre, vue par une de ses citoyennes mais aussi une critique de ses médias, de Fox News et autres journaux conservateurs. Plus largement une critique des médias en général, qu’on pourrait étendre à la France, n’était la sacro-sainte liberté d’expression américaine du premier amendement qui permet de diffamer à tout va, et repousse des limites qu’en France on s’est encore (un peu) fixé. Une critique de l’éphémère donc, puisque les médias trouvent « un os à ronger » avec l’histoire de l’héroïne, os qu’ils lâcheront bientôt pour un mets plus croustillant, plus en phase avec l’actualité brûlante du moment, avec les préoccupations des citoyens, avec l’audience et les parts de marché. Une critique du voyeurisme ensuite, de ce journalisme de proximité qui s’intéresse à l’adultère, au linge sale qu’on doit laver de préférence en public, c’est bon ça coco les larmes de la ménagère qui a trompé son mari, celles du mari cocu, et la vindicte populaire. Miam. Du sensationnel avec de l’ordinaire !

Enfin le livre de Douglas Kennedy est aussi une passionnante reflexion sur l’éducation et sur les directions, parfois inattendues, que prennent nos enfants. Il n’y a pas d’éducation parfaite, c’est entendu, tout le monde le sait, les enfants finissent toujours par se révolter contre le modèle de leurs parents, par prendre leur propre direction et faire leurs propres choix de vie, mais « Les charmes discrets… » y apporte sa touche, son propre constat, tout en justesse. Ça sent le vécu ! Douglas Kennedy aurait-il un fils détestant la littérature ? Ou votant républicain ? Une piste à explorer…
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